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.............................................................................................................................................Journal d'une pie (extrait)
Ainsi tu remontais le fil de ta vie, furtive.
Chère amie, ma petite pie,
Je t'écris car je sais que tu ne sais lire.
Penser à toi, c'est savoir, c'est m'entendre.
Ainsi me comprends tu.
Tu ne veux être utile à personne.
Les atmosphères ne peuvent être choisies d'avance.
Dans la création d'une de mes peintures, mon choix d'arrêter ou de continuer, révèle l'oeuvre. Ne souhaitant pas altérer celle-ci, je décide d'arrêter mon geste à un moment, pourtant ma réflexion continue, cette peinture continue d'évoluer dans mon esprit. Les inachevées sont les oeuvres les plus fidèles à ma pensée, je leurs concède le privilège de les aimer, sans aucune certitude et d'une manière imparfaite et incomplète.
Elles ne sont pas utiles.
L'âme inconsolable peut revêtir le costume de l'artiste qui, chaque jour, espère renvoyer la lumière depuis une faille de son esprit demeuré mutique, dans sa création.
Je t'entends vibrer en moi, avec ton chant mélodieux.
Odieux n'est-ce pas, de me voir dans ce monde de tavernes, esquisser l'irréalisable des rêves d'amour.
Des la première seconde de ma création, je supprime toutes les autres possibles déjà nées dans mon esprit. Je préfère alors les appréhender toutes, même si, en l'état, elles ne sont pas visibles à l'oeil nu.
Ce n'est donc pas vers un processus de création que j'engage tout mon être au travail, mais vers tous les possibles, qu'elle crée elle même.
Cela peut-être un mot à une couleur à un chiffre à un phénomène, une histoire ou une chose très futile, jusqu'à une découverte fortuite, jamais entendue ni comprise. Et c'est à ce moment précis, que j'arrête tout.
Puisque je découvre, je recouvre aussitôt.
Et je me lance dans une autre création.
Comme toi, de l'utilité ? À personne.Je t'écris car tu ne sais lire, et pourtant tu souhaites que je puisse t'écrire.
Gambader à travers les petits mots incompris, c'est croire qu'il n'y a pas d'absence au monde présent d'ennuis, c'est vouloir croire que la présence d'un charabia, te rend grâce, quelque part, la vie entre ces lignes, inonde la sécheresse d'un coeur esseulé.L'hiver est une lutte quotidienne, je ne t'abandonne pas.
Le printemps arrive au galop.
Dans ton palais le silence, tu conserves le goût de l'intervalle pour éviter les certitudes. Les provisions hivernales diffusent la nécessité des utilités, sans soleil, les jours sans drôleries, l'or se trouve dans la déception, au fin fond de la poche d'une humeur à guérir. Rien ne sert d'être en pleine forme en plein hiver, nous sommes dans toutes choses lentes, elles imposent de mûrir graduellement. Les pommes ne sont pas sur le pommier.
Résolutions secrètes, la précipitation la pire ennemie.
Inerties en tous genres, tendons la main à l'ennui, mon amie la petite pie.
La spontanéité de nos rencontres, forge une mémoire active, précieuse, elle irradie la hâte, car se souvenir, c'est ne pas brusquer la renaissance du bonheur.
Passe-temps inutiles afin de ne pas escamoter le printemps et l'oeuvre du temps.
Tu gambaderas sur ces mots grains noir du sablier trop grand, poivres utiles à l'espoir épicé, s'écoulent nos jours et nos nuits, et, de virgules en virgules, le rideau de l'attente raccourcis, enfin, les beaux jours ne seront plus que des rêves, mais bien d'autres possibles, en vérité. Si tant est qu'elle puisse se hisser, au dessus de tout soupçon, la vérité, voir fleurir les parterres et se surprendre être ému des poussées majestueuses.Chère pie, afin de ne pas dilapider ce trésor de correspondance en une seconde de lecture, venez me voir, car lire n'est pas de votre temps.
Bonne année.
Arbre
Ciel